Chagrin d'Adour
L’aurore ouvrait les yeux. Vous en souvenez-vous ?
Le ciel semblait sourire à l’eau d’une rivière
Dont le doux chuchotis apaisait les remous
Des pales du moulin, muet, comme en prière.
Et l’Adour sauvageonne inondait la clairière
Où des jeux enfantins ont laissé leurs froufrous.
L’aube lavait ses yeux. Vous en
souvenez-vous ?
Sous les roseaux, la barque attendait, balancelle
Des inspirations de vos rêves d’antan.
Dans les flots de vos yeux, le feu d’une étincelle
Animait votre rire à l’écho de l’Autan.
Sur notre ombre en miroir dans l’onde de l’étang,
Le platane joufflu s’étirait en ombelle.
Le jour clignait des yeux. Vous en souvenez-vous ?
Puis au bord de vos cils, au détour d’un regard,
J’ai lu tout le chagrin d’une enfance orpheline,
Une larme a coulé. Je vous sais tant d’égard ;
Votre main dans la mienne était douce et câline.
Comme un tendre péché, mon âme fut encline
Au désir d’un baiser. Mais il était bien tard.
La nuit fermait ses yeux. Vous en souviendrez-vous ?
Hélène